Editions Contre-Dires, Londres, 145 p.

Ce petit livre pratique est à la fois savant et amusant. L’auteur est un journaliste et militant gay anglais. Son livre est beau, richement illustré, et très facile à lire. On y apprend l’origine philosophique du Kâma Sûtra : le tantrisme, et sa place dans l’Inde contemporaine, ainsi que la présence de pratiques homosexuelles.

Le sexe dans le Kâma Sûtra est approché globalement, à travers toutes les formes d’épanouissement physique et intellectuel. Loin de l’esprit de débauche qu’ont voulu y voir les lecteurs de l’époque victorienne, il y règne au contraire un sens des vertus individuelles et sociales, à travers des règles de comportement et d’équilibre de vie intégrant une sexualité pleinement assumée. Le contexte actuel de l’évolution des mentalités occidentales vis-à-vis de l’homosexualité permet de relire ce texte avec un regard neuf. Le respect de l’autre, l’autosuggestion positive, l’acceptation de la pulsion sexuelle comme une force de vie, la reconnaissance des différents types physiques qui peuvent exciter le désir homosexuel (l’ours, l’antilope, le lion, le serpent, le guépard…) sont évoqués en même temps que le sexe protégé et l’utilisation du préservatif ou l’amour quand on est séropositif.

Pour souligner l’importance des préliminaires, le fonctionnement de chaque zone érogène du corps masculin est présenté sans fausse pudeur, petits dessins à l’appui. Des conseils aussi inattendus que le baiser au dentifrice sur les testicules sont irrésistibles… Le langage des gestes, le choix des accessoires, les précautions d’hygiène, les maladies sexuellement transmissibles sont clairement et simplement décrits et illustrés.

La description poétique des fameuses positions est bien sûr le point fort du livre : “ le mélange des graines de sésame avec le sel ”, “ attacher la plante grimpante ”, “ l’escalade de l’arbre ”, le “ duo des fleurs ”, la “ mastication du sanglier sauvage ”, le “ baiser de l’âme ”, “ les deux piliers ”, “ le saule courbé par la brise ”, “ le pilier et le lierre ”, “ le chien ”, “ le papillon ”, “ le cheval ”, “ le crabe ”, “ le bâillement ”, “ le trapèze ”, “ le train ” laissent augurer des heures de plaisir.

Mais au-delà des postures, les moments, les mots, les aliments, le contexte de l’amour sont au moins aussi importants. L’auteur se livre également à un éloge bienvenu de la masturbation, de la pornographie “ responsable ” et du sexe à plusieurs. Les difficultés telles que la sexualité du couple sur la longue durée, la bisexualité, le sadomasochisme, la recherche de la performance et l’esthétique ne sont pas occultées. Et de conclure évidemment que l’organe sexuel le plus puissant, c’est l’imagination.