Prix Goncourt de l’année 1980, ce roman de Navarre est sans concession. Tout à la fois féroce, cinglant, et émouvant, Navarre décrit une folie familiale, celle de la famille Prouillan, folie familiale dont l’un des symptômes, tu pendant près de vingt ans, refait surface et questionne chacun des membres de la famille sur ses responsabilités, ses complicités, ses rapports à la sexualité, à la mort. Le symptôme est grave et pourtant signe d’une époque où l’homosexualité était traitée d’une façon radicale. En effet, l’un des fils de famille, Bertrand, jeune homme promis à un brillant avenir, mais dont l’homosexualité est insupportable pour le père, subit à la demande de ce dernier, pour son bien, une lobotomie, c’est-à-dire une opération neurochirurgicale dont le but plus ou moins avoué est de faire de l’individu en question un être apathique, dénué de désir, atteint dans son intelligence et son autonomie. Le roman évoque le travail de mémoire des divers membres de la famille au milieu desquels se glisse subrepticement et incessamment, dérangeant par son originalité, sa brillance intellectuelle, son désir, ce garçon, qui aime d’autres garçons.