« Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le Royaume des cieux. » (Matthieu 19, 24). Lorsque le chameau arriva de l’autre côté, on découvrit qu’il portait l’étoile rose ! La réponse de l’association David & Jonathan aux tests psychologiques pour les candidats au sacerdoce.

 

 

Le chameau et l’étoile rose

 

Dans la semaine entre la fin du synode romain sur la Parole de Dieu et la fête de la Toussaint, la Congrégation pour l’Éducation catholique publie un nouveau document sur l’utilisation de tests psychologiques dans la sélection des candidats à la prêtrise (1). L’argumentation développée témoigne à la fois d’une instrumentalisation de la psychologie aussi contestable dans le fond qu’inefficace dans son application, et d’un incompréhensible mépris de cette Parole de Dieu dont on bafoue dans les faits une autorité qu’on s’époumone à proclamer urbi et orbi.

 

Parler de tests psychologiques, c’est soulever la question de la normalité et du caractère relatif de ce concept. « Normal vient du latin norma qui signifie « équerre ». Est donc considéré de prime abord comme normal ce qui est conforme à la règle… ce qui ne penche ni à droite ni à gauche, ce qui se tient dans un juste milieu. Une certaine rectitude participe de fait foncièrement des prérequis du normal. Ne serait donc pas normal ce qui est tordu, ce qui dévie, ce qui va de travers, ce qui ne rentre pas dans les cases que l’on définit. Mais serait, par contre, normal ce qui satisfait aux lois reconnues, ce qui fonctionne sans dérangement, sans raté, sans perturbation…De telles définitions condensent les risques de conceptions par trop orientées de la notion de normalité concernant le fait humain, notamment la vie psychique. Elles engagent un jugement de valeur et s’appuient sur un certain conformisme social. Non pas que de telles idées ou exigences soient foncièrement ineptes… mais si elles participent à définir quelque chose de la normalité, elles ne sont pas suffisantes et apparaissent bien vite problématisées par d’autres faits » (2).

 

Nul ne conteste que la dénonciation publique de nombreux faits de pédophilie – avec les sanctions financières qui s’ensuivent ! – ait largement contribué à promouvoir ces manœuvres de sélection. Pour autant, un groupe de victimes d’agressions sexuelles, basé aux Etats-Unis, estime que « les responsables catholiques continuent de se focaliser sur les responsables de ces actes en ignorant le vrai problème de fond, qui ne change pratiquement pas au sein de l’Église : la culture du secret et la puissance incontrôlée de la hiérarchie ». Dans le contexte de civilisation qui est le nôtre, on pourrait ajouter la question du célibat imposé et de l’équilibre affectif.

 

Pour être devenue habituelle, l’assimilation des tendances homosexuelles à ce type de comportements n’en demeure pas moins perverse. Faut-il rappeler les leçons de l’histoire, redire comment d’insinuations en stigmatisations, on encourage et justifie l’étoile rose et bientôt après l’extermination ? Faire des prêtres homosexuels autant de boucs émissaires incapables soi-disant d’accomplir correctement leur mission relève de la calomnie. Pour rendre leur dignité à tous ceux – et ils sont légions – dont la vie et le ministère témoignent du contraire, faudra-t-il, après tant de témoignages fiables et convergents dénoncer les promotions romaines de « blanchiment » d’authentiques prédateurs ?

 

Faute d’interroger sa propre crispation sur les questions sexuelles, le Vatican biaise par avance la pratique des tests de sélection des candidats à la prêtrise, au risque non négligeable d’en pervertir l’usage et de rendre plus douteuse encore leur efficacité. Reste à vérifier la pertinence de telles méthodes au regard de la Parole de Dieu.

 

Au jour de la Toussaint, c’est l’évangile des Béatitudes en saint Matthieu (5, 1-12a) qui est proclamé au cours de la liturgie. Tous ceux que le texte déclare « heureux » sont à un titre ou un autre hors de la norme, à côté de ce qui convient aux gens qui réussissent leur vie. Ils ne sont ni ne font « comme tout le monde ». Discernement paradoxal dont les critères contredisent l’évidence et appellent à voir au-delà ! Quels tests psychologiques pourraient leur reconnaître équilibre et compétences face au manque existentiel qui les caractérise ?

 

Que dire alors du choix par Jésus de ses plus proches disciples ? Aux résultats des tests d’aptitude, Jean se révèlerait-il en grande dépendance affective avec une identité sexuelle incertaine ? Judas, à l’évidence, manque de loyauté ! Quant à Pierre son excessive rigidité de caractère devrait le faire écarter. Simon le zélote a tout d’un déséquilibré et Paul, criminel à la conversion subite, est complètement exalté. Il faut ajouter qu’aux yeux de sa famille, Jésus, le chef de bande, est devenu fou. Ses adversaires pointent avec gourmandise les écarts provocateurs qu’il affiche par rapport à la Loi. Lui-même en rajoute avec ses fréquentations d’étrangers, de publicains et de prostituées. Se disant prioritairement envoyé pour les malades et les exclus, il bouleverse les normes avec le même entrain qu’il renverse les tables des changeurs : en colère et au fouet ! Qui pourrait le faire entrer dans les cases pré-établies ?

 

Quelle mouche a donc piqué les responsables de cette honorable Congrégation pour qu’ils succombent aussi facilement aux appels de quelques sirènes prétendument psychologisantes ? Comment les ramener à cet enseignement qu’ils sont censés professer : ce qui est faible, hors norme, ce qui est méprisé et semble insignifiant, voilà ce que Dieu choisit pour confondre la science et l’arrogance des forts ?

 

« Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le Royaume des cieux. » (Matthieu 19, 24)

 

Lorsque le chameau arriva de l’autre côté, on découvrit qu’il portait l’étoile rose !

 

David & Jonathan, 02-11-2008

 

 

 

(1) – « Orientations pour l’utilisation des compétences psychologiques dans l’admission et la formation des candidats au sacerdoce. » Congrégation pour l’Education Catholique 30 octobre 2008. Le document explicite les cas de « troubles ou pathologies sexuelles » incompatibles avec le sacerdoce, comme « les fortes dépendances affectives, le manque notable de liberté dans les relations, la rigidité excessive de caractère, le manque de loyauté, l’identité sexuelle incertaine et les tendances homosexuelles fortement enracinées ». (La Croix 31 -10-2008)

 

(2) – CHABERT C et VERDON B (2008) Psychologie clinique et psychopathologie, Paris, PUF, p.71-72.