Voici un texte préparé par David & Jonathan en vue du synode romain d’évêques que l’Église catholique prépare sur le thème de la Parole de Dieu.

 

Qu’as-tu fait de ton frère ?

 

L’Église catholique se prépare à réunir un synode d’évêques sur le thème de la Parole de Dieu. Chrétiens et homosexuels, nous nous sentons concernés par ces travaux. En effet, la Bible est régulièrement brandie pour justifier les condamnations et autres interdits qui nous frappent. Dans sa conférence au collège des Bernardins, le pape Benoît XVI a récemment mis en garde contre une lecture fondamentaliste, en rappelant l’indispensable travail d’interprétation collective que ces textes réclament aux générations successives. Pour cette tâche, jamais totalement achevée, notre époque fournit, avec les sciences humaines, des outils relativement nouveaux que le magistère s’obstine à récuser tant les questions qu’elles posent lui paraissent insupportablement dérangeantes. A cet égard, l’homosexualité est manifestement emblématique. La « loi naturelle » telle que proclamée à Rome, n’a que faire des apports de l’anthropologie par exemple.

 

Ce n’est pas un mince paradoxe pour une religion de l’incarnation que d’évoluer ainsi dans un monde d’idées où ne déambulent que des concepts. Sans forcer le trait, faut-il rappeler que l’homosexualité n’existe pas, mais bien des personnes homosexuelles, et qu’avant d’être tels, cet homme, cette femme sont ma sœur et mon frère devant notre Père commun ? Autant il est indispensable de ne pas réduire un être à tel ou tel de ses comportements, autant prétendre l’aimer en faisant abstraction d’une part essentielle de sa personnalité relève du mensonge. Comme les divorcés remariés, les homosexuels refusent d’être amputés pour soi disant être aimés. S’adressant à la femme adultère ou à la Samaritaine, Jésus les aime comme elles sont, sans condescendance ni faux-semblant. On chercherait vainement dans son enseignement la moindre trace de l’obsession sexuelle qui habite, semble-t-il, tant d’hommes de religion.

 

Parce que nous croyons et que nous expérimentons que l’Évangile peut être une Bonne Nouvelle dans nos vies d’hommes et de femmes, il nous importe de le faire savoir. Notre positionnement charnière entre croyants et homosexuels nous presse d’être solidaires des uns et des autres. Aux croyants que notre présence déconcerte ou agace, nous voulons dire que le sens ultime de notre « différence » nous échappe autant qu’à eux. Peut-être le créateur nous prémunit-il ainsi les uns et les autres contre toute suffisance ? Aux homosexuels, et particulièrement à celles et ceux qui sont traqués, injuriés ou exclus par les religions – et la nôtre y a sa part ! – nous voulons dire leur dignité et leur droit au respect. S’il faut, là, combattre pour y parvenir, nous voulons être à leur côté.

 

Il ne nous a pas échappé qu’en affirmant que nul n’est exclu dans l’Église catholique, et que chacun doit pouvoir y trouver sa place, Benoît XVI visait les intégristes et traditionalistes attachés les uns et les autres à ce que rien ne bouge tant en liturgie qu’en matière de mœurs. Il nous paraît justifié de le prendre au mot, et de l’interpeller sur les exclusions sélectives que ses discours encouragent. Si telle est sa lecture de la Parole de Dieu, il est urgent qu’il mette en pratique l’interprétation symphonique dont il se fait le chantre. Quant à nous, il nous semble, à lire conjointement et nos vies et les Écritures, que l’Esprit chante aussi par nos voix.

 

David & Jonathan