Par le colloque théologique international « Les Chemins de l’amour, pour une pastorale des personnes homosexuelles et transsexuelles », nous souhaitons aider le Synode Extraordinaire sur la famille à réfléchir sur l’accueil des personnes LGBT

Andrea Rubera, porte-parole pour le colloque, a dit: « La nouvelle de la convocation d’un synode extraordinaire sur la famille et le questionnaire envoyé à chaque diocèse du monde a déclenché un désir de participation sans précédent. Il est temps pour nous, les chrétiens LGBT, de faire notre contribution et de témoigner de la beauté, de la vérité, et parfois même de la fragilité de nos vies, comme une proposition pour la croissance de la communauté entière des fidèles. »
« La question que nous posons à l’Église est simple » a observé Gianni Geraci, autre porte-parole pour le colloque, « Comment une personne LGBT peut-elle vivre dans la plénitude sa vocation chrétienne à l’intérieur de l’Église sans se faire écraser par l’hypocrisie et l’isolement? »

Le colloque étant modéré par le correspondant du Vatican Marco Politi, les intervenants sont l’évêque australien Geoffrey Robinson (qui a été l’auxiliaire du Cardinal George Pell, l’un des huit membres du comité auquel le pape François a confié la tâche d’étudier la réforme de l’Église), le prêtre et théologien anglais James Alison, la théologienne dominicaine Antonietta Potente, la pasteure vaudoise Letizia Tomassone (présidente du Comité Baptiste, Méthodiste et Vaudois sur « Foi et homosexualité » en Italie). Des éclairages personnels viennent de Joseanne Peregrin (maltaise, mère d’un fils gay et présidente de la Communauté de Vie Chrétienne de Malte) et de croyants LGBT dont les témoignages sont transmis au colloque grâce au documentaire Vie et Espoir d’un Chrétien LGBT de la cinéaste Yulia Matsiy.
Faisant partie intégrale du colloque, un document est lu qui résume l’appel que le Comité d’Organisation du Troisième Forum Italien des Chrétiens LGBT a envoyé aux participants italiens au Synode et au secrétariat du Synode comme contribution au travail du Synode lui-même. L’appel a été rédigé pendant plusieurs mois par une équipe de travail, à partir des réponses faites par des groupes italiens LGBT chrétiens au questionnaire distribué l’année dernière (le texte est disponible ici).

Le colloque a été organisé par le Forum Européen des Groupes LGBT Chrétiens et soutenu financièrement par le Ministère de l’Éducation, de la Science et de la Culture des Pays Bas.

 


 

Déclaration des intervenants

« C’est Dieu qui a créé un monde dans lequel il y a à la fois des hétérosexuels et des homosexuels. Ce n’est pas une erreur de la part de Dieu que les êtres humains sont censés réparer; il s’agit simplement d’un aspect incontournable de la Création de Dieu. Les seuls actes sexuels qui sont naturels aux homosexuels sont des actes homosexuels. Ce n’est pas un choix libre qu’ils font entre deux choses qui leur sont également attrayantes, mais quelque chose qui est profondément enracinée dans leur nature, quelque chose qu’ils ne peuvent pas simplement mettre de côté. Les actes homosexuels leur viennent naturellement, mais pas les actes hétérosexuels. Ils ne peuvent pas pratiquer ce que l’Église appelle des actes ‘naturels’ d’une manière qui leur soit naturelle. Pour quelle raison ferions-nous appel à une abstraction pour déterminer ce qui est naturel plutôt que d’interroger l’expérience vécue d’êtres humains ? Comment pouvons-nous dire que les homosexuels agissent contre nature lorsqu’ils agissent en accord avec la seule nature qu’ils aient jamais expérimentée ? »
(Geoffrey Robinson, évêque australien)

« La véracité et la paix, la passion du réel, qui proviennent de la conscience d’être fille ou fils : voilà la source de l’imagination de ce qui sera la forme du Bien difficile auquel nous aspirons et dont la réalisation est le but dans lequel nous espérons nous trouver. La véracité qui découle de la capacité de parler à partir d’une conscience libérée n’est pas un rajout extrinsèque au fait d’être chrétien. Elle fait partie intégrale du sens de l’identité chrétienne. Elle permet de porter ce témoignage sans lequel il n’y a pas de christianisme. Pour nous autres animaux linguistiques, pouvoir parler avec netteté et ouverture est essentiel pour pouvoir vivre avec netteté et ouverture. C’est en parlant et en partageant les uns avec les autres nos expériences d’amour et de croissance que nous découvrons dans nos relations quel être nous sommes appelés à devenir. »
(James Alison, prêtre et théologien anglais)

« Je demande à la communauté des croyants: ouvrez un véritable espace dans lequel peut se développer une réflexion théologique. Et vous les croyants LGBT, vous ne devriez pas demander seulement d’être accompagnés ou d’être compris, car alors l’Église fera ce qu’elle a fait pendant des siècles avec les gens considérés comme pauvres. Ne tolérez pas ces relations de bienveillance factice et ne permettez pas à l’Église de s’en sortir ainsi. Aucun de vous n’est un ‘quelqu’un à plaindre’ ; chacun de nous dans l’assemblée de Dieu devrait se lever et parler avec audace et franchise. Voilà l’autorité qui nous permettra de comprendre, avec d’autres ayant fait d’autres choix, comment nous devons prendre responsabilité pour l’histoire. N’attirez pas l’attention sur vous : il suffit de la déplacer vers le point de questionnement. Vous devriez rappeler à la communauté des croyants que là où deux ou trois se réunissent ‘en Mon Nom’, ‘Je Suis’ est là au milieu d’eux et que ‘ceux qui écoutent la Parole de Dieu et la mettent en pratique’ deviennent le Temple de Dieu. Voilà les principes qui devrait interpeler l’Église. »
(Antonietta Potente, théologienne et religieuse de l’Ordre Dominicain)

« N’est-ce pas la vocation de l’Église d’être un lieu de liberté ? La salle de banquet si bien préparée que des miettes de liberté puissent tomber même vers ceux qui se cachent sous les tables par crainte d’être persécutés ? Se raconter est une des multiples voies vers un monde de plus d’authenticité et de vérité. Mais si les interstices et les fissures s’élargissent, le bâtiment entier risque de se fissurer. Mais en fait, c’est cela que nous voulons : que cet édifice d’hétéronormativité s’écroule, dans les églises aussi, car c’est un édifice qui cache et discrédite toute autre expérience de soi et du monde. »
(Letizia Tomassone, pasteure vaudoise et présidente de la Commission Baptiste, Méthodiste et Vaudoise sur “Foi et Homosexualité”)

« Au moment où mon fils m’a fait son ‘coming-out’, j’ai commencé automatiquement mon voyage vers mon propre ‘coming-out’ en tant que parent. Ce voyage est long et douloureux pour nous les parents, comme il l’a été pour nos enfants. Nous nous enfermons ou nous nous affaissons, parfois ayant recours à des antidépresseurs pendant des mois. Il y a un sentiment profond d’échec qui laisse les parents paralysés. De mon point de vue, prendre sur soi l’hostilité subie par les LGBT et choisir de les défendre au lieu de les juger, c’est cela, il me semble, la nécessité la plus urgente et universelle actuellement dans la vie de l’Église. »
(Joseanne Peregin, présidente de la Communauté de Vie Chrétienne de Malte)

 

Une pastorale accueillante pour les personnes homosexuelles et transsexuelles

Quelques propositions pour le synode des évêques
(version abrégé : le document intégral peut être lu et téléchargé ici).

Accueillir les personnes homosexuelles
Nous espérons une communauté ecclésiale qui pourra sincèrement accueillir et aimer les personnes homosexuelles, surtout au cours des turbulences de l’adolescence; une communauté qui les soutient dans leur découverte de soi, dans leur capacité de se relier aux autres, et dans leur pleine acceptation de leur dignité d’êtres humains capables de donner et de recevoir l’amour.

Accueillir les parents de personnes homosexuelles
Nous espérons une communauté ecclésiale capable d’accueillir les parents de personnes homosexuelles avec des paroles de soutien, qui les encourage à voir leur propre enfant comme créé dans l’image et la ressemblance de Dieu, comme digne de l’amour de Dieu et comme marqué par la Grâce dans tout aspect de leur vie ; une communauté qui rejette explicitement, comme n’ayant aucune valeur scientifique, toute approche qui propose de « changer l’orientation sexuelle » comme s’il s’agissait d’une question de choix. Ces approches soulèvent de faux espoirs et donnent des résultats décevants. Surtout elles favorisent une représentation superficielle de l’affectivité humaine et de sa complexité intrinsèque, représentation dans laquelle le bien de la personne est sacrifié sur l’autel de l’idéologie et de la norme.

Accueillir l’amour entre personnes de même sexe
Nous espérons un renouvellement profond des lignes directrices de la pastorale concernant les vies affectives des personne homosexuelles, qui reconnaîtra tout le bien qui se trouve dans l’expression de leur amour, et la valeur exemplaire d’un tel amour dans sa force et sa générosité envers les autres.

Accueillir les couples de même sexe
Nous espérons une communauté ecclésiale capable de recevoir dans son cœur les personnes homosexuelles chez qui le désir d’une vie de couple se déclare; une communauté qui sait inclure de tels couples, les embrassant et les guidant; une communauté qui s’est libérée des batailles idéologiques et qui est ferme dans sa conviction que l’amour du Christ est pour tous, étant pour tous la source de la vie en plénitude.

Accueillir les parents de même sexe
Nous espérons une communauté ecclésiale capable d’accueillir avec sincérité les enfants de parents de même sexe et qui tient à cœur leurs intérêts véritables; une communauté qui sait que c’est l’amour qui amène les gens à être parents et qui n’exclut pas de son sein ces parents de même sexe, qui sont les premiers appelés à transmettre le message chrétien à leurs enfants.
Résister à l’homophobie
Nous espérons une communauté ecclésiale sensible aux dégâts provoqués par l’homophobie quotidienne et capable de prendre une position nette en faveur des victimes, en créant un environnement inclusif et respectueux dans les diocèses et les paroisses qui mènera progressivement à l’éradication de l’homophobie. Nous espérons une communauté ecclésiale qui ressentira comme siennes la douleur et la crainte d’homosexuels et de transsexuels qui vivent dans des pays où ils sont criminalisés et qui sont confrontés tous les jours à des menaces contre leur vie et leur liberté à cause de leur identité et de leur amour; une communauté qui prendra position contre des formes de persécution qui sont les mêmes qui historiquement ont été infligées à l’Église elle-même.

Accueillir les personnes transsexuelles
Nous espérons une communauté ecclésiale qui se voue à démolir les barrières qui empêchent les personnes trans de devenir à part entière des membres de la société; une communauté qui sait embrasser la vérité et la beauté de leur chemin vers la liberté. De cette façon, le chemin de chaque individu, et de chaque communauté, peut s’enrichir des expériences diverses de tous ceux qui le partagent.